Jan Styka, Néron à Baïes, 1925.

  • Les comètes et destin des Romains.

On trouve dans Pline l’Ancien un curieux passage sur l'influence des comètes dans l'Antiquité, et plus particulièrement à Rome. Mais d'autres auteurs abordent la même thème. Ainsi, Lucain, dans La Pharsale, qui écrit en 48 av. J.-C. à propos d'une comète aperçue au nord-est de la constellation de Cassiopée au moment où Pompée et César livrent bataille :
« Le ciel menaçant couvrit de prodiges les terres, l'éther, la mer. Les nuits obscures virent des astres inconnus, le pôle embrasé et des torches volant obliquement du ciel à travers le vide, la queue d'un astre redoutable, la comète qui sur terre bouleverse les royaumes... »
Quatre ans plus tard, au cours de la semaine de septembre 44 avant notre ère, où l'on commémore la mort de Jules César assassiné en mars, une autre comète est observée. Ovide imaginera dans les Métamorphoses qu'il s'agissait de l'âme du dictateur.
« Vénus, écrit-il, descend des voûtes éthérées, invisible à tous les regards, et s'arrête au milieu du Sénat. Du corps de César, elle détache son âme, l'empêche de s'évaporer et l'emporte dans la région des astres. En s'élevant, la déesse la sent se transformer en une substance divine et s'embraser. Elle la laisse s'échapper de son sein, l'âme s'envole au-dessus de la Lune, et devient une étoile brillante qui traîne dans un long espace sa chevelure enflammée. »

  • Les comètes selon Sénèque (Questions naturelles, Livre VII, 1-3)

Le précepteur de Néron avait une interprétation bien plus rationnelle des comètes, même s'il reconnaît que ces phénomènes restent bien mystérieux pour l'être humain, étant donné que l'astronomie n'en est qu'à son balbutiement...

I. Il n'est mortel si apathique, si obtus, si courbé vers la terre, qui ne se redresse et ne tende de toutes les forces de sa pensée vers les choses divines, quand surtout quelque nouveau phénomène apparaît dans les cieux. Tant que là-haut tout suit son cours journalier, l'habitude du spectacle en dérobe la grandeur. Car l'homme est ainsi fait. Si admirable que soit ce qu'il voit tous les jours, il passe indifférent, tandis que les choses les moins importantes, dès qu'elles sortent de l'ordre accoutumé, le captivent et l'intéressent. Tout le chœur des constellations, sur cette immense voûte dont elles diversifient la beauté, n'attire pas l'attention des peuples ; mais qu'il s'y produise quelque chose d'extraordinaire, tous les visages sont tournés vers le ciel. (...) Survient-il quelque trouble, quelque apparition inaccoutumée, on regarde, on interroge, on provoque l'attention des autres. Tant il est dans notre nature d'admirer le nouveau plutôt que le grand! Même chose a lieu pour les comètes. S'il apparaît de ces corps de flamme d'une forme rare et insolite, chacun veut savoir ce que c'est ; on oublie tout le reste pour s'enquérir du nouveau venu ; on ne sait s'il faut admirer ou trembler : car on ne manqué pas de gens qui sèment la peur, qui tirent de là de graves pronostics. Aussi les questions se pressent, on brûle, de savoir si c'est un prodige, ou un astre. Non certes, il n'est point de recherche plus noble, d'enseignement plus utile que celui qui porte sur la nature des étoiles et des corps célestes : y a-t-il là une flamme concentrée, comme l'affirment notre vue et la lumière même qu'ils nous versent et la chaleur qui descend d'eux à nous; ou bien, au lieu de globes enflammés, sont-ce des corps solides et terreux qui, glissant dans les plages ignées, en reçoivent, pour briller ainsi, une couleur d'emprunt, une clarté qui n'est pas en eux ? Cette opinion fut celle de grands esprits : ils regardaient les astres comme des substances dures et compactes qui s'alimentent de feux étrangers. La flamme toute seule, disent-ils, se dissiperait, si elle n'était retenue par un corps qu'elle retient à son tour; un globe de lumière qui n'adhérerait pas à un corps stable par lui-même serait certes bientôt dispersé par le rapide mouvement des cieux.

II. Pour faciliter nos recherches, il sera bon d'examiner si les comètes sont de même nature que les corps placés plus haut qu'elles. Elles ont avec eux des points de ressemblance, l'ascension, la déclinaison, et aussi la forme extérieure, sauf la diffusion et le prolongement lumineux; du reste, même feu, même éclat. Si donc tous les astres sont des corps terreux, elles le seront pareillement. S'ils ne sont qu'une flamme pure, qui subsiste six mois durant et résiste à la révolution du monde si impétueuse, les comètes peuvent être aussi formées d'une substance déliée, que la rotation perpétuelle des cieux ne saurait dissoudre. Il ne sera pas hors de propos non plus de rechercher si le monde tourne autour de la terre immobile, ou si c'est le monde qui est fixe et la terre qui tourne. Des philosophes ont dit, en effet, que c'est nous que la nature emporte à notre insu ; que ce n'est pas le ciel, mais bien notre globe qui se lève et qui se couche. Question digne de toute notre attention, que celle de savoir quelle situation est la nôtre : si notre demeure est stationnaire ou douée du plus rapide mouvement ; si Dieu fait rouler l'univers autour de nous, ou nous autour de l'univers. Il faudrait aussi avoir le tableau de toutes les comètes qui apparurent avant nous : car leur rareté jusqu'ici empêche de saisir la loi de leur course et de s'assurer si leur marche est périodique, si un ordre constant les ramène au jour marqué. Or, l'observation de ces corps célestes est de date récente et ne s'est introduite que depuis peu dans la Grèce.

III. Démocrite, le plus sagace des anciens observateurs, soupçonne qu'il y a plus d'étoiles errantes qu'on ne croit : mais il n'en fixe pas le nombre et ne les nomme point; le cours des cinq planètes n'était pas même alors déterminé. Eudoxe, le premier, transporta d'Egypte dans la Grèce la connaissance de leurs mouvements. Toutefois il ne dit rien des comètes ; d'où il résulte que les Égyptiens même, le peuple le plus curieux d'astronomie, avaient peu approfondi cette partie delà science. Plus tard Gonon, observateur aussi des plus exacts, dressa le catalogue des éclipses de soleil qu'avaient notées les Égyptiens, mais ne fit aucune mention des comètes, qu'il n'eût point omises s'il eût trouvé chez eux quelques faits constatés sur ce point. Seulement, deux savants qui disent avoir étudié chez les Chaldéens, Épigène et Apollonius de Myndes, ce dernier si habile astrologue, diffèrent entre eux sur ce même sujet. Selon Apollonius, les comètes sont mises par les Chaldéens au nombre des étoiles errantes, et ils connaissent leur cours; Épigène, au contraire, dit qu'ils n'ont rien de positif sur les comètes, mais qu'ils les prennent pour des corps qu'enflamme un tourbillon d'air violemment roulé sur lui-même.

  • Un complément sur les astres à Rome :


Les astres à Rome


  • La biographie de Néron :