Corrigé du DS 2 de la BCE (2022)

Voici un plan possible pour le sujet de Denis de Rougement.

"A défaut d'ennemis déclarés, où sera le courage que l'on réclame des écrivains ? Faudra-t-il qu'ils l'exercent contre eux-mêmes ? Et peut-on livrer bataille qu'à l'adversaire que l'on porte en soi ?"

Que vous inspire cette interrogation de Denis de Rougement (L'Amour et l'Occident, 1939, repris 10/18, 1972, p. 25) ?


La littérature vit du conflit, et le courage de l'écrivain n'est que la conséquence de cette définition. S 'il n'y a pas d'ennemi extérieur, il faut en trouver : l'écrivain lui-même ou l'écriture elle-même, à défaut, la littérature peut elle-même disparaître. La littérature a besoin d'une résistance pour se développer.

Problématique : dans quelle mesure la la littérature est-elle toujours le fruit d'une lutte livrée par un écrivain courageux ?

1. La littérature est une lutte, une subversion

1.1. L'engagement des écrivains : Sartre, modèle d'un certain engagement dans Qu'est-ce que la littérature ? (1948)
1.2. La littérature comme réflexion morale et politique : Gide et la réflexion sur l'acte gratuit dans Les Caves du Vatican (1914) ou L'Immoraliste (1902) ; Victor Hugo sur la mission du poète dans Des Rayons et des ombres (1830)
1.3. La littérature est une lutte contre soi-même : Tanguy Viel, Icebergs (2019), sujet de l'ENS 2021.


2. La littérature peut être vue comme un apaisement, une joie

2.1. La poésie peut-être une manière de réenchanter la vie, de soulager une peine : "Pauca meae" dans Les Contemplations de Victor Hugo (1856) ; la poésie d'Henri Michaux (La Nuit remue, 1935), "Nocturne" de Léon-Paul Fargue (L'Intransigeant, 18 juin 1932)...
2.2. La littérature peut être la célébration de la beauté et de l'amour : "La Courbe de tes yeux" de Paul Eluard (Capitale de la douleur, 1926).
2.3. La littérature peut être ludique : les poèmes de l'OULIPO par exemple...


3. Le combat de l'écriture

3.1. Se faire une place parmi ses pairs et ses pères : Pierre Michon, sujet sur l'intertexualité (Le Roi vient quand il veut, Propos sur la littérature (2007).
3.2. Se battre avec le style : Gustave Flaubert "L'idée coule chez vous largement, incessamment comme un fleuve. Chez moi, c'est un monde filet d'eau, il me faut de grands travaux, d'art avant d'obtenir une cascade. Ah, je les aurai connus (sic), les affres du style !" Lettre à Georges Sand, 27 novembre 1866. Sous la plume d'André Gide, Édouard fait de l'écriture du roman une lutte : "le sujet du livre, si vous voulez, c'est précisément la lutte entre ce que lui offre la réalité et que, lui (le personnage de romancier), prétend en faire." (Les Faux-Monnayeurs, deuxième partie, chapitre 3, 1925)
3.3. Vivre et écrire sont deux actions qui se suivent et se complètent : le combat est le même. Chez Montaigne, dans les Essais (1595), l'écriture suit les méandres et les vicissitudes de la vie et l'œuvre est consubstantielle à son auteur.


Autre possibilité de troisième partie : qu'attend finalement le lecteur de l'auteur ? (attention : il y a un risque de redites) Il faut dans ce cas prendre la perspective du lecteur. Le lecteur attend : la beauté, la réflexion ou le divertissement, mais les conditions d'écriture lui sont peut-être indifférentes.